Au matin du deuxième jour, nous quittons l'auberge de jeunesse pour nous rendre à pieds dans le centre historique de la ville. Parcourir les rues de Strasbourg en escortant près de quatre-vingt adolescents n'est pas une mince affaire. Nous parvenons tant bien que mal à mener ce défilé jusqu'à la petite France.
Là, nous observons le passage d'un bateau par l'écluse puis nous arpentons les rues piétonnes afin de rejoindre la cathédrale où nous laissons un quartier libre aux élèves.
Après ces quelques moments de temps libres, tant pour les jeunes que pour nous autres, nous reprenons le chemin en direction des bus qui nous attendent place de l'Etoile puis partons en direction d'un endroit bien moins charmant, situés dans les Vosges à proximité.
Le "KL-Natweiller", ou camp de concentration de Natweiler-Struthof, était le seul camp de concentration présent sur le territoire français et y fut ouvert par les nazis le 1er mai 1941. Ainsi, bien que de taille "modeste", près de 22 000 déportés ont perdu la vie sur ces lieux entre 1941 et 1945.
L'atmosphère dans le camp est lourde. Chaque détail laisse imaginer l'horreur dont ces lieux ont été témoins. Les élèves n'y sont pas insensibles, en particulier quand nous approchons du four crématoire situé en bas du camp. Notre présence ici est l'occasion de les sensibiliser sur les raisons de ce qu'il s'est passé ici, sur la monstruosité des actes qui s'y sont déroulés. En effet, on a souvent trop vite fait de considérer, voire de caricaturer, les nazis comme des monstres inhumains et d'oublier que tout cela n'aurait pu se dérouler sans le "soutien" d'un peuple formé d'individus comme vous et moi, ce qui, dans le fond, est le plus effrayant. Le devoir de souvenir, c'est aussi essayer de comprendre comment le régime nazi a pu se mettre en place grâce à la voix du peuple, de comprendre comment tant d'individus ont pu soutenir une aussi terrible idéologie qui prit tellement d'ampleur qu'elle se développa en économie et industrie de la mort organisée, de prendre conscience de la véritable horreur de ce scénario.
Les monstres dans les fictions sont le plus souvent des individus isolés aliénés, psychopathes, ou des créatures inhumaines ou ayant perdu leur humanité. Mais que penser d'un peuple entier qui permet l'accès au pouvoir d'un parti qui mènera en seulement quelques années un génocide d'une telle ampleur. Ces citoyens étaient-il plus bêtes ou plus haineux que nous ? Avaient-il connaissance de la réalité de cette guerre ?
"C'est comme si j'étais en colère contre l'enfant que j'étais, contre cette petite chose puérile, comme si je n'arrivais pas à lui pardonner de ne pas avoir reconnu à temps le visage de l'horreur, le monstre."
C'est finalement un message à l'image de ces premières paroles du film "La Chute" (der Untergang de Oliver Hirschbiegel) qui m'occupe l'esprit lors de la visite : ce monstre n'aurait pu exister si tout un peuple ne s'était, d'une certaine manière, laissé embarqué par sa folie. Aussi, appartient-il à chacun de reconnaître les germes de la haine avant que de tels monstres ne naissent et prennent pouvoir.
Les monstres dans les fictions sont le plus souvent des individus isolés aliénés, psychopathes, ou des créatures inhumaines ou ayant perdu leur humanité. Mais que penser d'un peuple entier qui permet l'accès au pouvoir d'un parti qui mènera en seulement quelques années un génocide d'une telle ampleur. Ces citoyens étaient-il plus bêtes ou plus haineux que nous ? Avaient-il connaissance de la réalité de cette guerre ?
"C'est comme si j'étais en colère contre l'enfant que j'étais, contre cette petite chose puérile, comme si je n'arrivais pas à lui pardonner de ne pas avoir reconnu à temps le visage de l'horreur, le monstre."
C'est finalement un message à l'image de ces premières paroles du film "La Chute" (der Untergang de Oliver Hirschbiegel) qui m'occupe l'esprit lors de la visite : ce monstre n'aurait pu exister si tout un peuple ne s'était, d'une certaine manière, laissé embarqué par sa folie. Aussi, appartient-il à chacun de reconnaître les germes de la haine avant que de tels monstres ne naissent et prennent pouvoir.