samedi 16 mai 2015

En las cenizas del Telica (dans les cendres du Telica)

Il est bientôt 7h45 ce matin. Après avoir petit déjeuner un portion de gallo pinto accompagnée d'un leche agria à la terrasse d'un restaurant du Triangulo de la Centro-Amercia, quartier où je vis désormais à Managua, j'ai rejoint le kilomètre 7 de la carretera Sur, portion de la route Panaméricaine. Là, je retrouve François, ami et collègue, passioné entre nombreuses autres choses par les volcans.


Samedi dernier, le Telica, volcan situé à 100 km au nord-ouest de Managua, la capitale du Nicaragua, est entré dans une phase d'activité relativement importante, émettant des panaches de gaz et de cendres. Afin de mesurer l'ampleur et la signification du phénomène, François et son ami de longue date, Alain, souhaitent se rendre sur place pour observer l'état du volcan. Nous passons prendre Alain chez lui puis faisons route à bord du Suzuki Samuraï de François en direction de Léon, souhaitant au passage que toutes les pièces de l'antique véhicule resteront en place aujourd'hui. Pour nous rendre à Léon, deuxième ville du pays proche du Telica, deux routes s'offrent à nous : la carretera nueva Léon et la carretera vieja Léon. La vieille route étant plus jeune que le neuve, car refaite au cours des derniers mois et pas encore inaugurée, nous décidons de l'emprunter.
Nous enchaînons les virages et gravissons la côté de plusieurs kilomètres située à la sortie de Managua. Puis la route change peu à peu et nous nous retrouvons bientôt sur une grande ligne droite et claire de béton filant à travers des étendues de terres arides longeant de loin la côte du Pacifique sans rien d'autre dans le paysage que des pierres et des bosquets secs et à l'allure torturée. Alain nous conte le pourquoi d'une telle route au milieu de nulle part et s'étirant de manière si rectiligne à perte de vue. A l'origine, la voie n'était autre qu'un chemin d'accès pour l'entretien d'un ancien pipeline.
En chemin, nous nous arrêtons sur les rive du Rio Tamarindo pour observer une formation sur laquelle François s'interroge.





Il s'agit d'une formation d'ignimbrite, un dépôt de débris et cendres issus d'une éruption violente, de type nuées ardentes, et qui se sont agglomérés et soudés entre eux. Celle-ci fait partie d'une formation plus large, la formation Tamarindo (Wilson, 1941), formée Miocène-Pliocène.

Après cette petite pause, nous reprenons notre chemin en direction de Léon et du volcan Telica. Sur la route, nous nous arrêtons à plusieurs reprises pour qu'Alain interroge les habitants. Il recueille les témoignages afin de tenter d'évaluer l'ampleur des panaches de cendres émis et le volume approximatif de matériel évacué par le volcan. Puis nous empruntons le chemin escarpé nous menant sur les flancs du volcans, garons la voiture à quelques centaines de mètres en-dessous du sommet et entamons notre marche.
En chemin, nous rencontrons un habitant parti chercher de l'eau à cheval. Nous discutons un moment avec lui du volcan et de son quotidien puis nous rendons à une maison située un peu plus loin et où nous avons prévu de faire notre pause déjeuner.


Nous discutons avec l'homme habitant là tout en mangeant notre gallo pinto et nos œufs brouillés. Il nous parle des activités du volcan au cours de la semaine et nous explique que des blocs incandescents ont été projetés par le volcan mais qu'il n'y a pas eu d'émission de lave, ce qui confirme les dires d'autres témoins interrogés. Au cours de la discussion, soudain tout s'agite. Le volcan entre à nouveau en activité et émet un grand panache de fumée depuis son cratère. Nous nous précipitons à l'arrière de la maison pour observer le spectacle et regrettons de nous être arrêtés manger sans quoi nous serions aux premières loges pour y assister.





Le panache semble impressionnant mais nous sommes surpris par l'absence de bruit et de vibrations du sol (le son sur la vidéo, comme dans celles qui suivent, n'est que celui du vent). Tout est calme si ce n'est ce grand nuage de cendres qui s'élève dans le ciel.
Nous observons donc le phénomène de loin puis reprenons notre route en direction du cratère et dans la quête des blocs incandescents tombés la semaine passée. Après une petit heure de marche, nous parvenons sur d'anciennes coulées au pieds du cratère. Là, Alain analyse le paysage et nous dirige vers différentes roches pour vérifier s'il peut s'agir des fameux rocs : aspect de la roche, traces d'impact récent, herbe brûlée par le contact d'une pierre... Nous sommes sur le qui-vive.
En chemin, nous assistons à un autre dégazage, plus modeste celui-ci. Nous poursuivons notre recherche et finissons par trouver quelques uns des fameux blocs, certains d'une taille honorable bien que ridicules quand on les compare aux bombes volcaniques témoignant de la puissance de l'éruption de 1450.


Alain assis face à une pierre ayant été expulsée il y a quelques jours






On peut observer ici des plantes carbonisées au contact de la pierre
ce qui témoigne de la chute récente







Sur ce bloc, on peut observer un fracture en croûte de pain qui semble indiquer un possible début de phréato-magmatisme. Toutefois les indices sont faibles et l'ensemble de nos observations ne semble pas indiquer que du magma soit mis en jeu dans les phénomènes de cette semaine.











Certains blocs m'impressionnent tout de même par leur taille. Celui des photos qui suivent notamment, d'autant plus que l'on a pu observer les marques d'impact qu'il a laissé au cours de ses rebonds avant de s'immobiliser.





                           Fragments du blocs laissés dans les trous d'impact































Après ces quelques observations, nous décidons de nous rendre au bord même du cratère. Je suis à la fois excité et un peu inquiet à l'idée d'un nouveau dégazage. Je m'imagine le spectacle superbe tout en redoutant l'éventuel expulsion de blocs de la taille de ceux que l'on a vu. Toutefois je me conforte dans l'idée que le volcan n'est pas dans une phase d'éruption violente mais plutôt de relâchement de contraintes progressives et que le plus gros du travail a déjà été fait.

Nous arrivons au cratère et observons le fond. Un trou énorme s'y est formé, comme on nous l'avait décrit. Celui-ci, d'un diamètre que nous estimons compris entre 15 et 20m, n'était pas là il y a encore 10 jours.






Nous nous installons alors dans l'espoir de quelque événement.






Rien ne se passe, mis à part quelques éboulis sur les bord et à l'intérieur de l'abîme au fond du cratère. Cela semble comme le tunnel de quelque énorme ver cosmique (j'attends de voir le Falcon Milenium sortir mais rien...). Le paysage est vide, immense, mort... rien ne se passe et les heures passent. Alain souhaite rester jusqu'à la nuit, pour observer si des lueurs rouges subsistent, témoignant d'une chaleur importante des pierres dans le cratère (et non d'un supposé lac de lave comme le vendent frauduleusement plusieurs Tour Opérateurs de la ville de Léon tout proche).






La vue s'assombrit avec le soleil qui s'enfuit et toujours rien. L'abîme semble devenir de plus en plus profond avec l'obscurité. Nous estimons qu'il doit s'enfoncer à plusieurs dizaines de mètres au moins, peut-être jusqu'à 200m de profondeur.

Nous commençons à désespérer de voir quelque activité quand soudain :









Le spectacle se suffit à lui-même, il est impressionnant, saisissant. Nous voilà repus de notre soif de volcan pour la journée à tel point que François est maintenant impatient de rentrer. Alain nous fait toutefois attendre que les dernières lueurs du jours disparaissent pour vérifier s'il demeure ou non des rougeoiements dans le cratère, mais nous ne voyons rien.
Nous repartons donc à la lueur de nos lampes, un peu hagard pour ma part : content d'avoir assisté à ce spectacle mais également avec l'impression triste d'avoir observé les derniers souffles d'un volcan. Le Telica semble perdre de sa force et nous craignons que son activité ne diminue pour les prochaines années. Les pluies à venir, la saison des moussons arrivant, nous en diront plus sur ce que devient ce volcan dont la grande majorité de l'activité est d'origine phréatique.

vendredi 25 octobre 2013

La noche de los Agüizotes

Chaque année, lors du dernier vendredi du mois d'octobre, se déroule la noche de los Agüizotes (la nuit des Agüizotes). A ne pas confondre avec la célèbre Halloween, la noche de los Agüizotes s'inscrit dans le folklore nicaraguayen et fait vivre le temps d'une soirée les personnages des légendes et de la mythologie nicaraguayenne.




Le Tyran quiquivi (de son nom scientifique Pitangus sulphuratus 
ou Güiz en nicaraguayen)
serait l'oiseau annonciateur de mort dans le folklore nicaraguayen


Le terme agüizote proviendrait de Güis ou Güiz (le Tyran quiquivi) qui serait l'oiseau annonciateur de mort dans la tradition populaire nationale.
NdA : J'utilise un gros conditionnel, mon unique source pour cette information étant wikipédia :/ L'oiseau lui existe bien cependant, il était il y a encore peu sur un câble au-dessus de mon toit.







Les agüizotes sont ainsi un ensemble de personnages issus du folklore horrifique nicaraguayen et latino-américain : espantos, fantomes, hombres sin cabeza (hommes sans tête), mujeres lloronas (femmes qui pleurent)... La fête se déroule dans la ville de Masaya, capitale folklorique du Nicaragua située à une trentaine de kilomètres au sud-est de Managua.



La foule déguisée se réunie à la tombée de la nuit pour défiler dans les avenues de la ville au son des tambours et des cuivres, portant torche enflammées et toute une collection d'objets d'horreur allant du crâne de vache à la poupée poupon carbonisée et fumante suspendue à un pic. Une expérience particulière...






samedi 28 septembre 2013

Rencontre avec le Pacifique

7h15 ce matin, je monte dans un de ces anciens bus scolaires US qui font la liaison entre différentes villes du pays : direction Pochomil. 


Pochomil est une plage de la côte Pacifique située à environ 1h30 de bus de Managua. Le voyage est plutôt rapide donc, surtout pour moi qui vis sur la Carretera Sur (la route Panaméricaine) et n'ai donc pas à traverser toute la capitale pour me rendre sur la côte. J'en arrive ainsi à me demander pourquoi je n'ai pas pris ce bus plus tôt. Cela fait en effet aujourd'hui même deux mois que je suis ici et je n'avais auparavant jamais vu le Pacifique, ce maître des océans, situé de l'autre côté du globe par rapport à chez moi. Il faut dire que depuis que je suis arrivé, j'étais plus dans l'état d'esprit de prendre rapidement des repères, de tâcher de me sentir comme chez moi puis de m'investir dans mon travail, plutôt que dans l'esprit de l'explorateur, ce qui est bien dommage. Et puis, peut-être est-ce le fait que pour moi cet océan a toujours été une évocation littéraire lointaine, comme inaccessible et que, bien qu'habitant tout à côté de lui, j'avais toujours l'impression que de le rejoindre serait une épreuve longue et complexe, à ne pas prendre à la légère. Pourtant, la route n'est pas si longue..




Bref, j'ai donc pris le bus pour me rendre sur cette plage, l'une des plus faciles d'accès depuis Managua et des mieux équipées de la côte pacifique nicaraguayenne. Le voyage est rapide et peu onéreux (29 cordobas soit moins d'un euro). La route passe par le Crucero, une localité au sud de Managua, un peu sur les hauteurs (à près de 900m). Là, tout un groupe de personnes embarque avec des paniers remplis de bananes pour se rendre au marché de San Rafael del Sur, sur la route de Pochomil. La route se passe sans encombre. Nous parvenons à San Rafael, débarquons le chargement de bananes et continuons. Le bus arrive à une bifurcation : à droite, la route se rend à Masachapa, au localité sur la côté, et à gauche au Pochomil.


J'arrive enfin à destination. L'endroit est remplis d'installations proposant restauration, hamac et petite chambre à louer mais est presque vide. Il est encore tôt, pas encore neuf heures, la fréquentation du lieu augmentera légèrement dans la journée mais très peu : il y a plus de vendeurs ambulants, de pêcheur et de chevaux que de touristes sur cette plage aujourd'hui. Pourtant l'endroit est très sympathiques et de nombreuses activités y sont possibles : baignade, surf, promenade à cheval, pêche...


Après une petite promenade à pieds, jusqu'à la pointe sud de la plage, le temps de ramasser quelques coquillages, d'observer les grandes maisons construites aux bords du sable et de me griller le dos sous le soleil (pensez à emporter l'indice 50+ avec vous), je rencontre l'un de ces propriétaires de chevaux qui proposent des balades sur la plage. Dans un premier temps, je lui dis que je ne suis pas intéressé. Mais étant pratiquement le seul touriste de la plage, il n'est pas très occupé et reste à côté de moi pour discuter et me donne pas mal d'informations sur la plage. Il me mène notamment auprès d'une personnes louant des chambre dans un de ces restaurant : les pièces ne sont pas de tout conforts, petites et plutôt sombre et à la literie passable, mais pour une trentaine de dollars US, vous pouvez louer une pièce pour trois à quatre personnes. Une bonne idée pour passer le week-end complet ici et profiter du coucher de soleil. Il me mène ensuite à un autre restaurant en me conseillant de commander à l'avance si je veux manger : comme il n'y a personne aujourd'hui, les cuisinières ne préparent rien à l'avance. Je passe donc commande. Ayant trois quart d'heure à attendre, je demande à mon guide pour faire un petit tour à cheval. Il me propose la demi-heure à 70 cordobas. Nous remontons la plage dans l'autre direction , vers le nord, jusqu'à arriver en vue de Masachapa. Le meneur de chevaux me dit qu'il s'agit d'un village de pêcheurs, que l'on peut également s'y baigner mais que la plage est moins agréable car plus petite et jonchées des viscères de poissons vidés là par les pêcheurs. Il pointe alors la colonne de vautours qui tourne au-dessus du village pour appuyer son propos. L'image peut paraître un peu lugubre notamment avec en fond de toile en ancien quai de déchargement datant de la dictature, détruit par un ouragan et laissé en ruine depuis.



Nous retournons au restaurant et retrouvons les cuisinières en train de préparer le repas. Les installations sont assez sommaires aussi, quand je demande où je peux me laver les mains, on me fait entrer dans la cuisine et me donne une bassine d'eau. Rien d'exceptionnel, ce n'est pas la première fois que cela m'arrive. La cuisine est plutôt pittoresque et je demande aux cuisinières si elle veulent bien prendre la pose. Elle acceptent avec le sourire mais un peu intimidées visiblement : il faut dire que je leur ai annoncé que la photo serait visible sur le net et pourrait leur faire un peu de publicité.









Le repas est tout à fait plaisant, fin et copieux à la fois, et on appréciera tout particulièrement la présence d'un hamac à côté de chaque table pour digérer tranquillement en se laissant bercer par le son des vagues.











Bonne pêche : ici pas de canne,
un file de nilon et
une planche en bois suffisent
pour remonter le poisson depuis la plage

Une partie du butin récolté sur la plage de Pochomil



Rencontre un peu gonflée au bord de l'eau

La "Chela", féminin de chele, attend sagement devant le restaurant (Chele est réarrangement de leche qui veut dire lait pour désigner les blancs au Nicaragua. Le terme est un peu raciste mais couramment employé ici, sans mauvaise pensée, malgré qu'il puisse avoir une symbolique bien différente dans d'autres pays d'Amérique Latine).

mercredi 21 août 2013

Le fruit du jour : le Pitahaya

Le pitahaya (nom espagnol) ou pitaya, appelé également fruit du dragon, est l'un des nombreux fruits qu'on peut trouver dans notre petit jardin. Il s'agit ici de l'espèce Hylocereus polyrhizus, à la pulpe et à la peau roses.
Le pitaya est le fruit d'une cactée arbustive épiphyte, c'est-à-dire qui croît en se servant d'autres plantes plantes comme support.





Le pitaya est surtout utilisé pour faire des jus frais, sa couleur originale étant très attrayante. Le goût est assez doux, relativement peu sucré. Pour ma part et sur les conseil de la propriétaire des lieux, j'ai décidé de le goûter en faisant un yaourt aux fruit :


Belle découverte. Le gout rappelle celui de fruits rouges et, en cherchant un peu je retrouve la saveur de fraises des bois. Mon impression est confirmée en voyant le surnom anglais du fruit : strawberry pear.